mercredi 5 août 2009

Mohamed Ould Abdel Aziz : Les prémices d’une métamorphose ?




Le président de la République élu, Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de file de l’Union Pour la République (UPR) –même s’il l’avait quittée officiellement-, a rencontré le staff de sa campagne et tous ses démembrements au niveau des régions et départements, dans l’après midi du lundi 3 août, au Centre International des Conférences de Nouakchott (CICN)- Palais des Congrès.

Au-delà du remerciement de ses soutiens, Aziz avait apparemment passé, à sa manière, un message destiné à ses adversaires politiques. Les plus optimistes des observateurs assument cela à une volonté d’ouverture sur l’opposition.

Celle-ci, très attentive à ce qui sort du camp opposé, ne fait pas de commentaire. Une démarche à travers laquelle le désormais premier Magistrat du pays tenait à remercier les structures, les hommes et les femmes qui ont contribué à sa victoire du 18 juillet dernier.

Vibrant hommage suivi d’un appel du pied à l’intention de l’opposition en vue d’une ‘’participation à l’œuvre de construction nationale’’ dans un pays fortement éprouvé par plus d’une année de crise politique, institutionnelle et économique aigüe, dans un monde en pleine tourmente économique et qui se cherche encore, diplomatiquement, depuis l’avènement du président américain Barak Obama qui veut donner l’impression de respecter les particularités des autres...

Des propos tenus à 48 heures de l’entrée en fonction du nouveau chef de l’état. Un discours encore feutré, bien enveloppé dans des généralités, mais néanmoins perçu comme une certaine volonté d’ouverture par de nombreux observateurs.

Devant une assistance composée de ses partisans, Mohamed Ould Abdel Aziz a déposé la carapace du général et pris un écart avec la rhétorique du candidat, étalant au grand jour une certaine finesse politique « à partir de cette tribune, j’appelle ceux qui n’avaient pas adhéré à la voie du changement à le rejoindre ».

Une démarche suivant laquelle le président de la République élu et ceux qui enregistreraient positivement son nouveau message pourraient ensemble « emprunter le chemin menant à la réforme du pays et relever les défis du développement de façon que la Mauritanie devienne un espace où chacun trouve la place qu’il mérite de manière intègre, transparente et juste ». D’où un aveu : le nouveau et tout puissant chef de l’état ne peut pas, à lui tout seul, transformer les mentalités et la situation du pays. Nécessité absolument d’une synergie des efforts.

Une main « tendue » à une opposition dans un contexte politique post élection marqué par la contestation des résultats par des candidats battus à plate couture aux urnes, mais qui n’arrivent pas encore à comprendre et à digérer ce qui leur était arrivé. Et ne veulent point donner, gratuitement, un chèque en blanc à celui qui les a ‘’trompés’’.

C’est le cas notamment les principaux leaders : Messaoud Ould Boulkheir, du Front National pour la Défense de la Démocratie (FNDD), Ahmed Ould Daddah, Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD), et le dernier venu, Ely Ould Mohamed, indépendant, ancien chef de l’état, évoluant en singleton dans la catégorie.

D’où le déni de « légitimité » au nouveau maître de la Mauritanie. Savoir parler à un « adversaire » étant toujours perçu comme un signe d’intelligence politique et de grandeur. Aziz commence ainsi à surprendre et même dérouter partisans et opposants, pour des raisons diamétralement opposées.

Ce discours prononcé en public aurait déjà été dévoilé en privé devant un haut responsable de la coalition FNDD. Un homme politique face auquel le général à la retraite aurait plaidé en faveur de l’union sacrée au service de notre chère République. Le revers de la médaille par rapport à cette hypothèque, qui sonne comme une nouvelle orientation politique, est qu’elle est mal accueillie par les partisans du vainqueur de la dernière élection présidentielle. Des soutiens et souteneurs qui attendent avec impatience et boulimie les retombées et bénéfices de bonnes actions.

Resterait alors la question liée à la mesure de la capacité de nuisance de l’entourage du général à la retraite dans une Mauritanie où la tendance à s’écraser devant le tenant du pouvoir est un « défaut » largement partagé. Autre question qui demeure posée, la démarche d’ouverture de Aziz n’a pas été annoncée en termes clairs et nets.

L’appel à ses adversaires les prend comme étant des égarés qui doivent rejoindre le camp de la vérité. Une approche qui ne va certainement pas plaire à une opposition qui croit être roulée dans la farine par l’accord de Dakar et qui, par conséquent, exigerait réparation et compense contre le dommage subi.

Quels dividendes pour une éventuelle ouverture ?

Quels dividendes tireraient Mohamed Ould Abdel Aziz en opérant une ouverture vers ses opposants, avec pour conséquence l’instauration d’un véritable dialogue politique ? Le nouveau président de la République poursuivrait de la sorte la mise en œuvre de l’accord de Dakar à la fois au niveau de la lettre et l’esprit. Une voie qui devrait également pousser les interlocuteurs à reconnaître la régularité de la victoire du 18 juillet dernier et la « légitimité » du président de tous les mauritaniens.

Il faut également ajouter à ces paramètres l’encouragement au dialogue des partenaires de la Mauritanie : la France, ancienne puissance coloniale, l’Union Européenne (UE), principal bailleur de fonds qui conditionnerait une reprise effective de son aide et l’Organisation des Nations Unies (ONU) qui, par la voix du Secrétaire Général, Ban Ki Moon, incite le président élu de s’ouvrir sur ses opposants.

Plus que cela, Aziz, arrivé au pouvoir par un putsch militaire rejeté à l’intérieur et à l’extérieur, voudrait certainement savourer sa victoire en se voyant accepter par ceux qui s’étaient opposés à lui. Là, il y trouvera une quiétude en son fort intérieur et pourrait gouverner tranquillement le pays. Une performance que son père spirituel, Maaouiya, n’avait pas réussi à atteindre. Face à de tels enjeux, les états d’âme des chasseurs de prébendes en herbes, qui jonchent les allées du nouveau pouvoir, pourraient ne pas peser très lourds.

Kouchka

© Biladi

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