lundi 27 juillet 2009

1er tour du scrutin présidentiel Analyses chiffrées d'une victoire annoncée

Écrit par Cheikh Aïdara
26-07-2009
  • L'élection, au premier tour du scrutin du 18 juillet 2009, de MohamedImage Ould Abdel Aziz continue de susciter des réactions aussi bien en Mauritanie qu'à l'étranger. Si trois de ses concurrents contestent les résultats des suffrages, malgré la décision de la Cour constitutionnelle de les entériner en rejetant le recours qu'ils avaient introduits, plusieurs médias de par le monde n'ont pas manqué de parler de "Holdup up électoral " où même les "OVNI " auraient voté pour reprendre les propos de Ould Daddah.

D'ailleurs, la Commission de l'Union européenne et les Etats-Unis d'Amérique ne se sont pas encore prononcés par rapport au scrutin du 18 juillet, attendant d'y voir plus clair. L'analyse des résultats à l'Etranger, dans les Wilayas et les Moughataas permet de constater un raz-de-marée électoral sans précédent en faveur de Mohamed Ould Abdel Aziz dans les quatre coins de la Mauritanie, même dans les fiefs connus pour être des bastions inexpugnables de l'opposition.

Dans cette analyse chiffrée, nous proposons aux lecteurs des données comparatives dans le dessein peut-être d'apporter des réponses sur quelques aspects du scrutin controversé du 18 juillet 2009 au terme duquel, le candidat du pouvoir, Mohamed Ould Abdel Aziz a raflé la mise dès le premier tour, alors que les évaluations les plus réalistes tablaient sur un deuxième tour très difficile.

Mauritaniens de l'étranger

C'est la première fois que les Mauritaniens installés à l'étranger ont été associés à un suffrage électoral en Mauritanie, d'où l'absence de toutes données comparatives à ce niveau. Un simple constat permet de relever que Mohamed Ould Abdel Aziz a remporté, selon les résultats du scrutin, 48, 82 % de ces suffrages.

Dans le MONDE ARABE, il a remporté plus de 69 % des voix en Arabie Saoudite et 34 % aux Emirats, venant en deuxième position au Qatar avec 33, 15 %, après Gemil Mansour qui a obtenu 39, 78 %.

En ASIE centrale, il a également perdu en Chine derrière Gemil Mansour (49, 14 % contre 43, 97 %).

En AFRIQUE, Mohamed Ould Abdel Aziz a gagné avec de grands scores (des taux variant entre 49 et 84 %), notamment au Congo, en Gambie, en Côte d'Ivoire et au Mali. Il a été battu au Sénégal par Messaoud Ould Boulkheïr, 26, 68 % contre 36, 14 %.

Au MAGHREB, Ould Abdel Aziz a été devancé au Maroc et en Algérie par Gemil Mansour (34, 50 % contre 27, 78 % et 39, 74 % contre 32, 05 %) alors qu'il l'emportait allègrement en Libye par plus de 56 % des suffrages.

En EUROPE, Mohamed Ould Abdel Aziz a été battu en Belgique par Ibrahima Mokhtar Sarr qui a obtenu 34, 59 % des suffrages contre 25, 15 %, mais aussi en Italie où il est venu 3ème avec 16, 28 % des suffrages derrière Sarr Ibrahima Mokhtar qui a obtenu 44, 19 % des voix et Kane Hamidou Baba (17, 44%). Par contre en France et en Espagne, Mohamed Ould Abdel Aziz rafle la mise avec 36, 42 % et 47, 89 %.

L'analyse de ces résultats à l'étranger met en exergue une faiblesse saillante des forces de l'opposition au sein de la diaspora mauritanienne, une diaspora que l'on croyait pourtant acquise à leur cause, notamment en Europe. On se rend compte que le camp de Messaoud et de Ould Daddah ont été laminés partout, notamment en Belgique, en Italie, et même en France, où le FNDD a été battue malgré tout avec 3 points d'écart par Mohamed Ould Abdel Aziz. Le tripatouillage des listes électorales qui n'a pas permis le vote des partisans de l'opposition a été évoqué, mais surtout la complicité des chancelleries chargées de leur confection. Par exemple, les plus grands scores de Ould Daddah sont celui qu'il a obtenus en Espagne (8, 83 %), en Belgique 8, 81 % et en France avec 6, 30 %, recueillant à peine 2, 33 % en Italie. Messaoud enregistrait quant à lui 11, 32 % en Belgique, un peu plus de 13 % et de 15 % en Italie et en Espagne.

Par contre, on remarquera que plusieurs candidats ont été plus célèbres à l'extérieur que dans le pays. C'est le cas de Sarr Ibrahima Mokhtar, Kane Hamidou Baba et Mohamed Gemil Mansour.

Vote au niveau national

Mohamed Ould Abdel Aziz a remporté les suffrages dans 51 Moughataas sur les 53 que compte le pays, ne perdant que légèrement à Boutilimit devant Ould Daddah (46, 41 % contre 41, 53 %) et à El Mina devant Messaoud (37, 43 % contre 35, 05 %). Partout ailleurs, ces scores ont varié entre 50 et 80 %, raflant les 13 Wilayas de la Mauritanie.

Wilaya de Nouakchott

Connu pour être un bastion imprenable de l'opposition, la Wilaya de Nouakchott a toujours été hostile au pouvoir en place. Lors de la dernière élection présidentielle de 2007, le candidat supposé du pouvoir, Sidi Ould Cheikh Abdallahi, n'avait obtenu au 1er tour de l'élection qu'un peu plus de 10 % des voix, alors qu'Ahmed Ould Daddah en raflait 23, 80 % et Messaoud Ould Boulkheïr 16, 05 %.

Dans le passé, malgré la fraude à ciel ouvert, le bourrage des urnes et l'implication directe de l'administration en sa faveur, Ould Taya n'a jamais pu gagner à Nouakchott. En 1997, lors du boycott de la présidentielle par l'opposition, le taux de participation à Nouakchott n'avait pas dépassé son plus bas seuil, 22 %.

En 2009, Ahmed Ould Daddah aurait perdu plus de 17.000 électeurs à Nouakchott alors que Messaoud en aurait gagné presque 13.000 ! Il est difficile d'expliquer une telle alchimie, sinon qu'Ahmed Ould Daddah a perdu plus de 36 % de son électorat dans la capitale, une ville dont il contrôle la Communauté Urbaine en plus de trois de ses plus importantes Moughataas, Tevragh-Zeina, Ksar et Teyarett. Il est vrai que la commune de Tevragh-Zeina était finalement revenu au PRDR alors que ses deux maires, celui du Ksar et celui de Teyarett avaient basculé du côté de Aziz.

Le candidat Mohamed Ould Abdel Aziz a ainsi accompli l'exploit d'avoir pris à l'opposition ses fiefs traditionnels, arrachant au RFD et à son candidat Ahmed Ould Daddah, les Moughataas de Tevragh-Zeina (43, 18 % contre 19, 50 %), Ksar (49, 66 % contre 20, 40 %) et Teyarett (53, 14 % contre 21, 69 %).

Les citadelles favorables à Messaoud Ould Boulkheïr, Riyad et Sebkha sont aussi tombées d'une fort curieuse manière dans l'escarcelle de Aziz qui n'a laissé à son adversaire que son précarré d'El Mina. En effet, à Sebkha, Aziz l'emporte devant Messaoud à 34, 34 % des voix contre 27, 74 %. Idem à Riyad, où il a raflé 37, 15 % des suffrages contre 28, 48 % à Messaoud. Ce dernier a pu cependant conserver avec difficulté El Mina qu'il remporte devant Aziz par 37, 43 % contre 31, 05 %.

Lors de l'élection de 2007, Messaoud était resté maître à El Mina, légèrement devant Sarr Ibrahima Mokhtar, lequel avait cependant dominé le vote à Sebkha avec 44, 38 % des suffrages. Curieusement, Riyad qui avait voté APP aux municipales de 2006 avait choisi Ahmed Ould Daddah durant la présidentielle, lui accordant plus de 30 % des suffrages.

Par rapport à ces trois départements, Ahmed Ould Daddah a accusé au cours du scrutin de 2009 un recul pharaonique comparé à ses scores en 2007. Ainsi, il obtient 7, 19 % des suffrages à El Mina, alors qu'en 2007, il en avait 15, 81%. Il obtient 14, 70 % des suffrages en 2009 à Riyad, alors qu'en 2007 il avait raflé plus de 30 % des suffrages dans cette Moughataa. A Sebkha, contre ses 14, 33 % de voix en 2007, il n'en conserve aujourd'hui que 4, 43 % ! Ahmed Ould Daddah a aussi perdu Arafat, Dar Naïm et Toujounine qui lui étaient acquis en 2007, une perte évaluée à presque 8 %.

Les Wilayas du Centre, Brakna et Tagant

En comparant les résultats obtenus par Ahmed Ould Daddah, Messaoud Ould Boulkheïr et Sarr Ibrahima Mokhtar en 2009 avec leurs résultats en 2007, on se rend compte de la grande chute de Ould Daddah et de Sarr au Brakna et au Tagant, et d'une remontée de Messaoud grâce à l'appui des cadres du Front, dont la famille de l'ancien Chef de l'Etat Sidi Ould Cheikh Abdallahi au niveau du Brakna et des Idaouli au Tagant.

D'une manière globale, le Brakna et le Tagant sont tombés dans l'escarcelle de Ould Abdel Aziz qui obtient respectivement dans ces deux régions, 42, 53 % et 58, 71 % des suffrages. Il faut dire que ces deux régions n'ont jamais été favorables à l'opposition, Ahmed Ould Daddah et Messaoud Ould Boulkheïr n'ayant obtenu en 2007 au Tagant, respectivement que 12, 15 % des suffrages et 4, 69 %.

Ainsi, Ould Daddah qui avait obtenu 30, 49 % des suffrages à Aleg en 2007, n'en a recueilli en 2009 que 17, 85 %, alors que Messaoud opérait un véritable bond en engrangeant au cours de ce scrutin 25, 75 % des suffrages dans la capitale du Brakna contre 5, 32 % en 2007.

A Bababé, Boghé et MBagne, d'anciens fiefs de Sarr Ibrahima Mokhtar qu'il avait remportés en 2007, on note la chute dramatique de Daddah qui passe de 11, 02 % en 2007 à 3, 94 % en 2009 à Boghé, de 12, 36 % à MBagne en 2007 à 3, 28 % en 2009. Au même moment, Sarr a vu sa côte de popularité baisser d'une manière drastique. Lui qui avait gagné Bababé, Boghé et MBagne en 2007 avec des scores respectifs de 35, 26 % ; 35, 93 % et 38, 92 %, s'est retrouvé en 2009 avec 18 % à Bababé et Boghé et moins de 15 % à MBagne.

Par contre, Messaoud a pris beaucoup de voix par rapport à ses performances de 2007 dans la région. Il obtient ainsi à Bababé, 24, 60 % des suffrages contre 9, 7 % en 2007 ; à Boghé il est parvenu à réunir 32, 87 % des suffrages alors qu'il n'en avait obtenu en 2007 que 12, 6 %.

Au Tagant, Ahmed Ould Daddah continuait de descendre, surtout à Tichitt et Moudjéria. Il a obtenu lors du scrutin de 2009 à Tichitt, 1, 82 % des suffrages alors qu'en 2007 il en avait engrangé 16, 62 %. A Tidjikja, il perd quelques électeurs, passant de 6, 49 % en 2007 à 1 % en 2009.

Messaoud Ould Boulkheïr a par contre gagné beaucoup de voix à Tidjikja et Moudjéria. Dans la capitale du Tagant, il a obtenu en 2009 : 28, 39 % des suffrages alors qu'en 2007, il n'avait pu recueillir que 4, 79 % de voix dans cette cité. Même performance à Moudjéria, fief de l'ancien Premier ministre Yahya Ould Ahmed Waghf où il a engrangé en 2009 quelques 15, 24 % des suffrages contre 5, 17% en 2007.

Wilayas du Sud, Gorgol et Guidimagha

Le Gorgol et le Guidimagha ont massivement voté Aziz, lui accordant respectivement 49, 75 % et 51, 14 % de leurs suffrages. Comme les Wilayas du Centre, le Sud n'a jamais voté opposition depuis les élections de 92. En 2007, Messaoud avait obtenu au Gorgol 13, 01 % des voix et au Guidimagha 14, 86 %, alors qu'Ahmed Ould Daddah avait obtenu respectivement au Gorgol et au Guidimagha, 19, 56 % et 12, 92 %

Lors du scrutin de 2009, Messaoud Ould Boulkheïr a pourtant relevé ses scores dans ces deux régions, obtenant au Gorgol 27, 52 % des suffrages et au Guidimagha 24, 65 %. Par contre, Ahmed Ould Daddah a été saigné, n'obtenant qu'un peu plus de 5 % des suffrages dans chacune de ces régions.

A Kaédi, on a noté une formidable remontée de Messaoud qui passe de 11, 2 % des suffrages en 2007 à 28, 71 % en 2009, alors que Sarr Ibrahima descendait vertigineusement, passant de 36, 26 % en 2007 à 12, 93 % en 2009. Ahmed Ould Daddah a peu perdu de son électorat dans la capitale du Gorgol, obtenant 5, 11 % en 2009 contre 6, 33 % en 2007.

Le Leader de l'opposition Ahmed Ould Daddah a d'ailleurs chuté partout au niveau du Gorgol sauf à Monguel où il est remonté de 6 % en 2007 à 12 % en 2009. Il a perdu cependant du terrain à Mbout (5, 39 % en 2009 contre 10, 27 % en 2007) et à Maghama, 5, 04 % en 2007 contre 2, 91 % en 2009. Au Guidimagha, il a aussi légèrement perdu à Ould Yengé et à Sélibébay.

Par contre, l'appui du FNDD a été fortement ressenti dans les scores de Messaoud qui a remonté à Maghama (17, 11 % en 2009 contre 5, 65 % en 2007), à Mbout où il a obtenu au cours du dernier scrutin 32, 22 % des suffrages alors qu'en 2007, il n'en avait recueilli que 19, 21 %. Même performance à Monguel où il est sorti avec 25, 94 % des voix alors qu'en 2007 il avait obtenu à peine 14 %, ainsi qu'à Ould Yengé, 16, 16 % en 2009 contre moins de 7 % en 2007.

A part une légère remontée à Maghama et à Mbout, Sarr Ibrahima a perdu du terrain au Gorgol.

Wilaya de l'Est

Jusqu'aux jours précédents le scrutin, Mohamed Ould Abdel Aziz était donné perdant en Assaba et dans les deux Hodhs. On avait parlé de l'adhésion de plusieurs ensembles de ces régions dans le giron de l'opposition. Il faut dire que ces régions n'ont jamais été favorables au candidat du RFD et celui du FNDD, Ould Daddah et Messaoud. En 2007, Ahmed Ould Daddah avait obtenu en Assaba, 14, 83 % des voix contre 11, 28 % pour Messaoud. Au Hodh Charghi, il avait recueilli 10, 42 % des suffrages contre 4, 82 % pour Messaoud et au Hodh Gharbi, il avait obtenu 9, 65 % contre 2, 80 % pour Messaoud.

En 2009, on note une légère remontée de Messaoud Ould Boulkheïr dans ces régions et une stabilité relative dans l'électorat d'Ahmed Ould Daddah qui a partout reculé.

Messaoud a fait des performances partout à l'Est, sauf dans les deux Hodhs, notamment à Koubeni et Tamchakett au Hodh Gharbi, et à Néma et Timbédra au Hodh Charghi. A l'inverse, Ahmed Ould Daddah a beaucoup chuté dans les régions orientales du pays où les pronostics lui créditaient de bons scores, accusant son plus grand recul à Tamchakett où il est passé de 20, 39 % des suffrages en 2007 à 1, 84 % en 2009.

Messaoud a enregistré ses plus importantes performances à Barkéwol, Kankossa et Boumdeid, avec respectivement 18, 24 % des voix en 2009 contre 4, 1 % en 2007 à Barkéwol, 8, 13 % en 2009 contre 4, 45 % à Kankossa en 2007, et 10, 82 % en 2009 contre 3, 56 % en 2007. Il a fortement régressé à Néma, passant de 7, 65 % en 2007 à 6, 91 % en 2009.

La lecture de ces résultats permet de constater que si l'appui dont a bénéficié Messaoud Ould Boulkheïr, au cours du processus électoral où il a été désigné candidat du FNDD (un regroupement de plusieurs partis politiques, de syndicats et de personnalités) a été plus ou moins traduit sur le terrain par ces scores en hausse partout au niveau du territoire, cette même règle ne s'est pas appliquée dans le cas d'Ahmed Ould Daddah. En effet, le candidat du RFD est celui qui a enregistré les plu fortes adhésions au cours de la campagne électorale. Non seulement, il a perdu des milliers d'électeurs fidèles qui ont toujours voté Daddah, mais l'apport considérable dont il a bénéficié ne s'est nulle part manifesté, à de très rares exceptions. C'est comme si le Leader de l'opposition a recueilli des intentions de vote massives qui se sont curieusement évaporées le jour du scrutin.


Source L'Authentique

(Suite dans notre prochaine édition)

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