mardi 28 juillet 2009

Autopsie d'une défaite: comment le FNDD a fondu






Interrogé sur les matières à enseigner aux petits écoliers nègres, un idéologue de la pensée coloniale avait repondu : "Tout sauf l’histoire". En effet, l’histoire est une arme efficace pour ceux qui savent en user proprement. Et c’est à cela que nous invitons nos lecteurs.En effet, puisque les événements du 18 Juillet sont rangés désormais dans cette rubrique du passé, nous avons senti nécessaire de soumettre la stratégie de l’oppisition et toute cette séquence temporelle à une analyse objective pour voir comment, en dépit de la noblesse de son objectif, l’opposition mauritanienne, reunie sous le Front National pour la Défense de la Démocratie (FNDD), a reussi si hautement à echouer si lamentablement. L’espoir est que cette analyse puisse permettre les futurs Fronts et les formations politiques de l’arene politqiue mauritanienne d’éviter pareilles erreurs.

En Mauritanie, nous l’avons dit, l’armée a toujours montré son incapacité à rester neutre face aux événements politiques et le peuple a toujours lorgné du côté de l’armée pour obtenir des réponses aux impasses politiques. De ce fait, chaque fois que le pouvoir en place, imposé ou élu, a vacillé, l’armée, sans être invitée, a surgi des casernes pour jouer cette fausse carte de sapeur-pompier. Et l’armée a toujours su pointer le doigt accusateur vers les politiciens. Elle a toujour su chercher et trouver la raison de son intervention dans l’incapacité des politiciens mauritaniens à trouver des solutions politiques aux problèmes politiques. Et l’accès d’Aziz au pouvoir s’inscrit dans cette logique militaire mauritanienne mais avec une particularité qu’elle intervient après le limogeage du putchiste. Donc la méthode d’accès au pouvoir n’est pas une nouvelle donne historique; elle est un non-événement et
l’explication encore moins.

Bien sur que nous ne partageons pas cette explication militaire ou le recours à l’armée pour débloquer des institutions démocratiques. En effet, nous pensons que les crises politiques dans une institution démocratique sont nécessaires, obligatoires et inévitables. Et loin de constituer un signe de faiblaisse, elles dénotent la vitalité de l’institution démocratique ; elles ne sont pas un signe de faiblesse mais plutôt un signe de renouveau. Mais il faut s’empresser d’ajouter que ces secousses ou tectoniques instititionnelles doivent être gérées politiquement et résolues par elles-mêmes grâce à des politiciens sages et conscients et grâce à des recours démocratiques. L’institution démocratique doit "s’auto sapeur-pompier", autrement dit créer ces "pathways" de sortie de crise. Bref, elle doit accoucher ses propres solutions. Voilà pourquoi nous pensons aussi que tout démocrate doit, ne serait-ce que par principe,
rejeter toute forme d’accès au pouvoir qui n’utilise pas l’urne comme rampe de lancement et ceci même si l’institition démocratique en place était vacillante.

Voilà ce qui nous amene au sujet de cet article et voilà pourquoi, à notre avis, l’objectif du FNDD au lendemain du coup militaire est logique et louable: dénoncer le coup militaire et proner le recours à des moyens démocratiques pour retablir l’ordre constititionnel. Bien sur que certains de nos lecteurs nous retorquerons que le pouvoir d’Abdallahi n’était pas démocratique. Tel n’est pas l’objet de cet article mais disons au passage que l’attitude d’Aziz est encore moins. De plus, les institutions mauritaniennes ont accepté qu’Abdallahi était le Président élu.

Donc s’il faut saluer l’objectif FNDD, il faut critiquer et même dénoncer la stratégie choisie et ceci pour plusieurs raisons :

D’abord le FNDD n’est pas représentatif des Mauritaniens dans leur ensemble et la dernière fois que nous avons verifié il n’était pas mandaté par les Mauritaniens pour négocier le depart d’Abdallahi ou de quiconque. Le FNDD n’est pas une institution nationale ; il n’est ni le Sénat ni l’Assemblée. De plus, si Abdallahi est véritablement un "Président élu par les Mauritaniens et Mauritaniennes" comment un simple regroupement de formations politiques amorphes peut-il négocier le depart de ce "Président élu" sans jamais consulter les Mauritaniens? Il s’agit ici de ce que nous appellons l’erreur de depart. En effet, en négociant le retrait d’Abdallahi, "le Président élu", le Front, de facto, signifiait aux Mauritaniens que leur vote n’a aucune importance. Et par la même logique reconnaissait le coup d’Aziz car c’est exactement ce que le moustachu avait signifié aux Mauritaniens en s’emparant du pouvoir.

Pour être logique, Dakar ne devait pas comporter la clause du retrait du "Président élu par les Mauritaniens". S’il est élu par le peuple, il ne devait être deposé que par le peuple et FNDD n’est pas le peuple. Voilà pourquoi nous pensons que le FNDD a failli aux Mauritaniens et aux principes démocratiques dont il pretend être le defenseur et que son attitude est simplement un autre coup d’etat mais civil celui-là. Et voilà aussi pourquoi nous osons croire que les signataires de l’Accord Cadre de Dakar ont soient pris du Don Garcia (eau de Bacchus) pour du Bissap (boisson) le matin de la signature ou alors ils ont pris du Jaljali pour du Kurus(chapelet) lors de la prière précédant la signature de l’Accord.

Ensuite, en refusant d’associer IMS et "Eey we Kan" (HBK) aux négociations de Dakar, le Front a ouvertement donné l’impression que la communauté poularaphone était de trop. Il s’agit là d’une erreur stratégique monumentale puisque cette composante est, quoi qu’on dise, pionnière dans la lutte pour l’égalite et la justice en Mauritanie. On ne peut pas écarter IMS et HBK de Dakar et de ses accords et imputé cela à leur attitude vis-à-vis du coup. Et voilà ce qui nous permet de le dire. En effet, on ne peut pas écarter le "souteneur du coup" et pourtant négocier avec "l’auteur du coup". Si la raison de leur mise à l’écart est leur soutien au coup, la delegation d’Aziz devait être écartée aussi car elle est le coup.

De plus, la Mauritanie n’appartient pas au FNDD et tous les Mauritaniens ne sont pas obligés de supporter Abdallahi ou Aziz ou encore moins le Front. Et puisque Dakar était la plateforme de sortie de crise en Mauritanie, toutes les formations poliques mauritaniennes devaient être autour de la table. Le FNDD n’a pas le monopole du patriotisme et encore moins le monopole de la verité. De plus, certains membre du FNDD n’avaient-ils appelé, haut et fort, l’armée à sortir des casernes pour sauver les institutions démocratiques et retablir l’ordre? Le seul problème est que l’armée qu’ils attendaient n’est pas celle qui a surgi des casernes. Le FNDD devait donc inviter tous les Mauritaniens y compromis IMS, HBK, les formations, mouvements et personnalités de l’opposition en exil.

Ensuite, en décidant d’aller hativement à l’election et dans un delai si court, le FNDD a perdu une opportunité d’expliquer aux Mauritaniens, Mauritaniennes et au monde leur projet politque. Il aurait aussi fallu le temps de former les populations dont la plupart votera sans sous doute pour la premiere fois du fait de la particularité de cet episode politique et placer partout des observateurs et des rapporteurs pour veiller au bon déroulement des élections. Et les refugiés dans tout ça?

Notons ici que les élections ne se gagnent pas seulement dans les grandes villes. Et beaucoup de Mauritaniens ne savaient pas encore quel front le Front allait affronter. Pire encore, le Front était tellement convaincu qu’il y aurait un second tour qu’il n’a pas songé au cas écheant. Voila pourquoi au lieu de présenter un front unique, l’opposition est allée "en tête d’hydre" pensant seulement à l’après-premier tour. Une erreur que seuls les "non-initiés de la politique" pouvaient se permettre.

Pour nous, l’échec du FNDD est d’abord l’échec du son leadership et de sa stratégie. Et comme le disait à juste titre le Pr. Barry Dorn de Harvard University lors d’un séminaire recent auquel nous prenions part : "Poor leadership is a health hazard" et les Mauritaniens viennent de s’en rendre compte.

Et le jour du scrutin, le FNDD, faute d’avoir consulté IMS et "Eey we Kan" et autres opposants mauritaniens en exil, a raté l’opportunité de bénéficier de cette sagesse peule : "Ne faites pas l’éloge de la nuit avant de voir la levée du soleil". Et les dirigeants du FNDD se sont rués vers les micros tôt le matin pour chanter "le bon déroulement de l’élection" alors que la logique conseille d’avancer des déclarations comme "nous attendons les rapports de tous les votes avant de nous prononcer", "les Mauritaniens veulent qu’on respecte leur vote", "nous attendons les nouvelles de l’interieur du pays", "certaines localités, du fait des moyens de communications rudimentaires, tarderons à communiquer le resultat des votes" etc…, etc…, etc…

Enfin, le FNDD a oublié de revisiter le bon sens cartésien. En effet, comment peut-on penser que celui qui a pris tous les risques du monde pour faire et reussir un coup militaire pour contrecarrer une décision politique, a defié la communauté internationale et ses sanctions va-t-il organiser des élections "libres et transparentes" pour simplement voir Massaoud et Daddah atterir au palais et lui dans une prison quelque part en Mauritanie?

Et voilà pourquoi le Front a, à notre avis, raté les rendez-vous de Dakar et du palais présidentiel de Nouakchott. Mais cet épisode pourrait aussi servir lors des conquêtes à venir et nous disons seulement à tous les hommes politiques du pays, servez-vous du 18 Juillet comme du retroviseur : voir ce qui est derrière mais tout en continuant la lutte.

Siikam SY
Chief Editor
Free Speech Mauritania

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