mardi 7 avril 2009

L"Edito de la Tribune Mohamed Fall Ould Oumère


21:38

L’Edito de La Tribune








L’erreur fatale de l’opposition aura été d’avoir compté sur l’extérieur. Inspiré par une diaspora activiste et porté par son discours d’aspiration légitime à la restauration de la démocratie, l’opposition a oublié l’essentiel : la bataille de l’intérieur. Il a fallu les déclarations du PrésidentSarkozy pour réveiller les hommes politiques. Trop tard probablement…

La grande erreur aura été d’avoir refusé d’anticiper en proposant un schéma acceptable et surtout imparable. Pourtant… L’opposition avait pour gagner cette bataille qu’elle est sur la voie de perdre faute d’imagination. L’histoire d’abord. Il s’agit d’une opposition qui a vécu 1992 et tout ce qu’elle a porté de désaffections et d’expériences malheureuses pour la démocratie naissante. Elle avait aussi l’atout de la représentativité.

En effet l’opposition d’aujourd’hui est composée de toutes les figures de l’histoire politique deMauritanie. Des nationalistes arabes et négro-africains, aux anciens communistes, aux islamistes, aux dignitaires de l’ancien régime, aux notables politiques et sociaux… tout y est.

Ces composantes ont leurs pendants – ou leurs soutiens – à l’extérieur : la Libye pour les nationalistes arabes, l’Iran et le clan arabe du refus pour les islamistes, certains réseaux européens et français en particulier pour les militants de la gauche traditionnelle, le Sénégal et le Maroc pour les milieux de notables et dignitaires… On se demande aujourd’hui qui influençait qui, entre les groupuscules et leurs soutiens de l’extérieur ? qui compte pour qui ? Mais là n’est pas la seule «anomalie».

En 2008, c’est le syndrome de 1992 que nous avons vécu. Certains politiques ont refait exactement le chemin de 92, celui de 2005. L’un et l’autre ont été pourtant sans grands résultats.

En 1992 le manque de visibilité avait amené l’opposition à refuser de reconnaitre les résultats de l’élection présidentielle, d’en appeler à la pression extérieure et de boycotter la législative qui a suivi (mars 92). On sait depuis qu’il s’est agi là du péché originel qui a conduit le processus démocratique de Ould Taya vers une normalisation de la dictature qui lui a permis de régner 13 ans de plus.

En août 2005, la «précipitation» et l’essoufflement ont obligé l’opposition à Ould Taya de se jeter dans les bras des militaires dont le chef n’était autre que la clé de voute du système honni. Le manque de «prévoyance» a empêché les hommes politiques de tempérer leur passion pour une transition dont ils n’ont absolument pas fixé les règles, encore moins le timing.

En 2007, des segments de l’opposition ont choisi – de façon délibérée et en toute connaissance de cause – d’épouser le schéma des militaires en apportant leur soutien au candidat Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Ils adhéraient ainsi à l’agenda des militaires. Un agenda dont ils n’étaient pas les concepteurs et dont ils ignoraient les véritables desseins.

Nous récoltons aujourd’hui les fruits de ce que nous avons semé. Il ne faut s’en prendre qu’à nous-mêmes. Parce que nous avons été incapables de capitaliser les expériences du passé, nous n’avons pas pu ou su peser sur le présent. Encore moins sur l’avenir. Il est temps de se regarder, de s’écouter et de reconnaitre les erreurs des uns et des autres.

Personne n’est au-dessus du regard critique. Les militaires doivent être exclus du champ politique. D’accord. Mais le personnel politique n’est-il pas disqualifié par ses errements qui ont conduit à de fautes lourdes ? Est-ce que nous ne vivons pas justement les derniers moments d’un dispositif politique désuet ?

Quand on voit qu’en Guinée, les acteurs politiques et ceux de la société civile ont pu faire front au moment qu’il faut et comme il faut, et qu’ils ont obtenu les résultats qu’il faut, qu’àMadagascar le personnel politique – pour ou contre le pouvoir – a la capacité de mobiliser en permanence, on ne peut qu’en vouloir à nos hommes politiques qui semblent ne voir que le siège du pouvoir.

Et non le chemin qui y mène. Le moment est fatal pour le personnel politique traditionnel : prendre l’initiative et anticiper ou assumer la responsabilité historique de l’échec et accepter enfin de se démettre. C’est peut-être le premier pas vers le changement. Le grand changement.

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